Retour aux sources - Il est temps d'être enfin soi-même 2/3
Dans l'article 1/2, je faisais un point sur les tabous et les censures qui nous empêchent injustement d'être nous-mêmes. Après m'être penchée sur les blocages qui viennent de l'extérieur, je me responsabilise et j'essaie de refaire surgir ma personnalité. Comment étais-je avant d'être influencée socialement ?
Cécile
4/20/20255 min read
Il est indéniable que les attentes familiales ou liées au genre, ainsi que les normes sociales, nous empêchent de nous sentir pleinement libres. Dans la première partie de mon article, je fais le constat qu'il y a un décalage entre ma personnalité qui rêve d'être libre et de partager, et la personne qui a peur de transgresser et de s'ouvrir. A présent, je vais tâcher de trouver des moyens de me libérer, et cela passe certainement par la réappropriation de ma personnalité originelle : Qui étais-je, avant ?
Retour à la personne originelle
J'ai remarqué que j'étais fascinée et touchée par les œuvres qui font réfléchir à cette problématique : Comment serait-on si on n'était pas influencés par toutes les conventions sociales ?
Récemment, j'ai relu L’étranger d’Albert Camus. Meursault est un personnage gênant et “étrange” parce qu’il ne se comporte pas comme on l’attend. Il est peu empathique, que cela choque tellement que ça lui sera fatal. Cela amène nécessairement à se poser la question de qui on serait vraiment si on n'attendait pas de nous certains comportements : Pleurerait-on aux enterrements, même si on ne se sent pas si touché ? Ferait-on semblant ? Nous sentirions-nous coupables de vivre, lorsque nous devons être en deuil ? Dirions-nous ce que nous pensons sans aucun filtre ?
Le film Amanda réalisé par Carolina Cavalli actuellement sur Arte m'a également interpelée pour les mêmes raisons. Le personnage d'Amanda adopte une attitude si directe qu'elle est déroutante. Elle se moque des bonnes conduites. Il en est de même de l'héroïne de Poor things réalisé par Yórgos Lánthimos : le film questionne tous nos acquis sociaux.
Ces trois œuvres m'ont fait me demander comment je serais avant l’éducation, la morale, la culture et les normes. Est-ce que je me sentirais plus libre, car sans aucune limite ? Ou est-ce que je serais en marge et incomprise, comme ces personnages qui n'ont aucun tabous mais évoluent au sein d'une société qui en a plein ? Est-ce que c'est cela que je dois rechercher, me marginaliser pour être enfin moi-même ? Et si nous détruisons tous les tabous, si personne n'a aucune limite, pourrions-nous vivre ensemble ? Une affirmation de notre individualité, sans égard pour autrui, peut entraîner l’isolement. Bien sûr que nous sommes des êtres sociaux et que nous aspirons à être compris et aimé des autres.
La question clé que je me pose en fait est la suivante : Comment bien vivre avec moi-même et avec l'altérité ? Peut-être que j'aurai plus de réponses en me tournant vers l'enfant que j'étais. A quel moment, dans ma confrontation à l'autre, ai-je commencé à perdre de vue ma vraie personnalité, et pourquoi ?
Retour en enfance
Un article du numéro 74 de Flow, le magazine de la créativité et de l’épanouissement, nous incite à réfléchir à nos rôles modèles, ces femmes réelles ou fictives qui nous inspirent à être nous-mêmes. Petite fille, je me suis souvenue que j’admirais le personnage de Sissi, non pas dans le film mais dans la série télévisée d'animation Princesse Sissi créée par Bruno Bianchi et diffusée en 1997. Avec mes sœurs, on regardait les épisodes en boucle. Pour mieux comprendre cette admiration, j'ai regardé de nouveau tous les épisodes. Quelle nostalgie ! Quels souvenirs ! Et avec mon regard d'adulte, j'ai mieux compris ce qui me faisait vibrer étant enfant et ce qui m'a construite.
Dès le générique, j'ai été frappée par les paroles de la chanson : en entendant “Sissi”, plus de vingt ans plus tard, c'est comme si je me reconnaissais. En effet, depuis que je vis en Espagne, on m’appelle beaucoup Ceci. C’est marrant, cette similitude. Au fur et à mesure des épisodes, je me rends compte que cette chanson de générique n'est peut-être pas anodine dans l'exercice qui m'encourager à revoir la série. Dans ce désir de revenir aux sources de ma personnalité, la voix chante justement “Laissez-moi rester moi-même. Sissi.”
Il y avait plusieurs choses que j’admirais dans ce personnage, et notamment, que c’est une jeune fille libre et rebelle. Elle monte à cheval, aime la nature et n’en fait qu’à sa tête. Ma mère m’avait raconté que lorsque j'étais petite, je voulais avoir un cheval : ça faisait d’ailleurs bien rire toute la famille, mais c’était certainement parce que je pensais trouver la liberté à travers ce symbole. A défaut, j'ai trouvé une autre monture, mon petit vélo : en tournant en rond dans le jardin, je m’imaginais être Sissi sur son cheval (et j’ai d’ailleurs toujours aimé retrouver par la suite cette forme de liberté en faisant du vélo). J'aurais pu faire de l'équitation, mais une autre activité s'est proposée à moi : la danse classique. Vers mes quatre ans, je regardais des ballets à la télé. Ce que je voyais, c'était une danseuse étoile épanouie sur scène : belle, souriante, confiante et élégante. Je voulais être cette personne et faire des pointes dans le but de m’élever et de m’envoler avec grâce et légèreté. En réalité, je n'ai jamais vraiment aimé la danse classique avant de pouvoir faire des pointes, et aujourd'hui encore, c'est ce qui m'anime à continuer. Dernièrement, on m'a fait ce beau compliment : “Quand tu danses sur scène, tu brilles.” Aurais-je en fait atteint cet idéal de jeunesse : me sentir libre, moi-même et épanouie ?
Si je mène ce travail d'introspection et écrit cet article, c'est parce que cette quête n'a pas complètement réussi. La scène est cet endroit où je n’ai pas peur d’être libre et d’être vue, mais ce n'est pas comme la vraie vie. Peut-être que là où j'ai le plus échoué, c'est dans le fait d'être moi-même malgré le regard des autres. Ce qui m'a frappée en regardant le dessin animé Sissi avec mes yeux d'adulte, c'est que Sissi se fait des ennemis parce qu'elle résiste et refuse de changer (se plier au fameux protocole de la cour de Vienne). Alors certes, elle se fait des ennemis, mais c'est aussi sa différence et son courage à rester fidèle à elle-même qui font qu'elle est aussi appréciée. D'une gentillesse extrême, généreuse et dévouée aux autres, elle est toujours bien entourée et aimée, proche de sa famille, de ses amis et de son amoureux Franz. Alors comment se fait-il que j'aie tendance à m'oublier pour ne pas être rejetée, alors que ce modèle fictif me montrait l'exemple ? Comment n'ai-je pas compris que la réponse au rejet était de se montrer empathique (Sissi n'en veut jamais à ses ennemis, elle sait qu'ils sont jaloux d'elle) et de poursuivre sa route quoi qu'il en soit en s'entourant bien ?
Je comprends alors progressivement qu'on peut nous empêcher d'être libre, mais qu'on peut essayer de ne pas avoir peur de cette liberté. M'autoriser à être moi-même malgré la peur de ne pas être acceptée : c'est ce que j'explore dans la suite de cet article.